jeudi 19 juillet 2007

Critique "Omagh"

Omagh
de Pete Travis
2006
Paru dans l’hebdo ICI Montréal


CRIME ET IMPUNITÉ

Omagh plaide pour les proches des victimes d’attentats. Beaucoup de bons sentiments, un peu moins de cinéma.


Si l’Irlande se calme ces temps-ci, ça barde toujours sur ses écrans. Après avoir filmé des dramatisations de procès, d’enlèvements, de bombardements et autres matraquages du temps pas si lointain des « Troubles », le Shamrock tourne la caméra vers la dernière zone à découvert de ce chapelet de terreur : la population.


Le 15 août 1998, le marché du village d’Omagh éclate en pièce à la suite de l’explosion d’une bombe cachée dans une voiture stationnée à quelques pieds des boutiques : 29 civils y perdent la vie. Au lieu de péter les plombs et en retourner quelques-uns contre le premier suspect venu, les parents des victimes se sont regroupé et ont formé le Omagh Support & Self Help Group pour obtenir réparation en toute légalité en brandissant des pancartes bricolées, en louant des cars et en se serrant les coudes. Mais, coup sur coup, le clan s’est buté à un commissaire hésitant, des informateurs peu crédibles, une population en choc et un Gerry Adams encore nerveux quelques mois seulement après que l’IRA ait entériné la timide signature des Accords du Vendredi Saint… Rapidement, le club des endeuillés se demande comment la paix peut être envisagée sans justice.


Au nom de ses visées sociales et de son devoir de mémoire, Omagh s’accroche aux faits et martèle son message issu de la masse : fini le temps de la peur et du silence, on réclame des noms, la police doit procéder à des arrestations, la cour doit juger ; bref, la machine doit sortir de sa torpeur et protéger avec conviction les citoyens de toutes croyances.


Les liens avec Bloody Sunday (2002) ne sont pas fortuits : on retrouve Paul Greengrass, réalisateur de ce dernier, à la production et l’écriture d’Omagh, tout comme Gerard McSorley, natif du bled en question, convaincant en flic gradé dans le premier comme en père décimé dans le second. Au diable donc la facture feuilleton, la mise en scène indécise et la caricature des mœurs brossée à même les uniformes si le cinéaste Pete Travis a pensé avant tout son film en tant qu’objet d’utilité publique. Omagh est simple sans être simpliste, éducatif sans être enlevant.


© 2007 Charles-Stéphane Roy