jeudi 19 juillet 2007

Critique "Little Miss Sunshine"

Little Miss Sunshine
de Jonathan Dayton et Valerie Faris
2006
Paru dans l’hebdo ICI Montréal


CONCOURS DE LAIDEUR

Little Miss Sunshine se moque des ambitions de la classe moyenne avec un message tout sauf joli.


Dès ses premières images et les premières mesures de sa bande sonore, Little Miss Sunshine affiche fièrement son appartenance au cinéma indépendant américain. Pas surprenant que cette production au budget modeste mais à la distribution 4 étoiles ait fait explosé les enchères lors du dernier Festival de Sundance : les comédies sur des familles dysfonctionnelles semblent toujours aussi indémodables auprès des cinéphiles les plus cyniques.


Schématique à souhait, multipliant l’humour physique et les bassesses inusitées, Little Miss Sunshine s’apparente à un Welcome to the Dollhouse le malaise en moins. L’irrationnel désir de la grassouillette et peu agile Kira à remporter un concours de beauté pour juniors ne sert qu’à mettre en lumière le ridicule des membres de sa famille, plus prompte à s’engueuler qu’à encourager la petite.


Comment pourrait-il en être autrement lorsqu’on doit ménager quotidiennement les susceptibilités d’un père motivateur intransigeant, d’une mère débordée, d’un grand frère devenu muet depuis qu’il lit Nietzsche, d’un oncle gay suicidaire et d’un grand-père cocaïnomane ? Contre leur gré, les proches de Kira s’embarquent à bord d’un vieux Westphalia et prennent tous ensemble la route de la Californie afin de permettre à celle-ci de participer à la compétition ; leur trajet sera évidemment marqué par les confrontations et les incidents pathétiques.


La finale chaotique constitue pour sa part un catharsis à la fois bienvenu et suspect à cette course contre la médiocrité : après s’être moqué pendant tout le film des aspirations de ce clan incapable d’accéder au rêve américain, les réalisateurs Jonathan Dayton et Valerie Faris n’ont rien trouvé de mieux que de transférer leur mépris du succès sur les autres concurrentes, montrées ici comme hypersexualisées, factices et abruties.


Entre le rire facile et l’ironie sans mesure, on retiendra de Little Miss Sunshine les interprétations convaincantes d’Abigail Breslin (la petite de Keane), les singeries assumées d’Alan Arkin et un Steve Carell plus humain que cinglant.


© 2007 Charles-Stéphane Roy