mercredi 18 juillet 2007

Critique "A Scanner Darkly"

A Scanner Darkly
de
Richard Linklater
2006
Paru dans l’hebdo ICI Montréal

LA CHASSE AUX ÉLÉPHANTS ROSES

Le psychédélique A Scanner Darkly pourrait bien être la campagne anti-drogues la plus tendance vue au cinéma.


L’adaptation d’une nouvelle ou d’un roman de l’écrivain de science-fiction Philip K. Dick au cinéma n’est pas une nouveauté en soi : Blade Runner, Total Recall, Minority Report et même Confessions d’un barjo sont quelques-unes de ses nombreuses œuvres à avoir inondé le grand écran, avec des succès relatifs. Écrit en 1979, A Scanner Darkly a pourtant tardé à subir le même lifting – Terry Gilliam et Charlie Kaufman ont tour à tour été associés au projet. L’un des plus grands succès en librairie pour Dick, A Scanner Darkly est incidemment son ouvrage le plus personnel. Grand explorateur d’univers parallèles, Dick y traitait pour la première fois d’une réalité qui avait moins à voir avec les gadgets futuristes que les paradis artificiels qu’il a fréquenté mais dont plusieurs de ses amis sont demeurés prisonniers.


Étonnant au premier abord, l’intérêt pour le livre de Dick du réalisateur Richard Linklater, le parrain des ‘slackers’ des années 1990, est plus naturel qu’on pourrait le croire. Parce que Linklater s’entête à filmer avec détails l’immobilisme de la génération X, et parce que son Waking Life, qui redonnait à la technique rotoscopique ses lettres de noblesse, convenait naturellement à ce trip hallucinogène que vivent en permanence Charles l’obsédé, James le verbomoteur, Ernie la patate de sofa et Bob le désabusé, qui forment la bande d’allumés de Scanner Darkly.


Un agent de la brigade des stups prend l’identité d’un revendeur pour pincer Bob, un accro à la drogue « D », qui cause des ravages dans la population. Pour infiltrer son cercle d’amis, Bob quitte sa famille et s’acclimate à la drogue, si bien que les hémisphères de son cerveau deviennent de plus en plus court-circuitées.


Plein d’humour, d’un moralisme sobre, A Scanner Darkly souffre néanmoins du même syndrome qu’un Fear and Loathing in Las Vegas : parler des drogues à partir d’un récit délibérément psychédélique n’est peut-être pas la meilleure manière de soutenir l’attention de son public. L’effet frappe, mais s’estompe rapidement.


© 2007 Charles-Stéphane Roy