mardi 17 juillet 2007

Critique "Idole instantanée"

Idole instantanée
de Yves Desgagnés
2005
Paru dans l’hebdo ICI Montréal


ON ACHÈTE BIEN LES CHEVAUX

Les nouveaux moralistes prêchent la cote d’écoute : Idole instantanée, ou l’art de s’enfarger dans trop de semi-degrés de lecture.


30 ans après que Jean-Claude Lord nous ait parlé d’amour avec une grande hache, on corde plus de vedettes que jamais pour réchauffer nos foyers solitaires. Ayant provoqué un tollé à l’époque où Guy Cloutier faisait main basse sur la relève, cette satire d’une industrie qui avait déjà entamée la conversion du consommateur en produit engendre aujourd’hui un modèle bien de son époque : l’éloge réactionnaire, le manifeste conciliant, qui consiste à taper sur une tare et la dédramatiser dans la même foulée en adoptant un double discours obstinément inclusif. Télé et réalité se sont toujours nourri mutuellement ; que l’extension de cette relation débouche sur du voyeurisme de guerre 24/7 ou dans le linge sale de personnalités publiques importe peu. Faut-il alors se surprendre que la grande lucarne subisse le même traitement ? Plus l’objectif se précise, plus les délimitations éthiques deviennent vagues. Et chacun est invité à joindre la grand-messe : comédiens, figurants, victimes – tout le monde le fait (et en parle), faites-le donc, si bien qu’ignorer ou rejeter le genre relèverait tout simplement de la trahison culturelle, de l’élitisme, voire même d’hypocrisie décriés illico lors de ces multiples procès d’intention public à la mode sur les grands réseaux.


Ainsi s’inscrit Idole instantanée, proposition 2005 du consortium Cinémaginaire/Alliance Atlantis à l’appel d’offre estival des institutions. Ce pâté chinois contient manifestement plus de purée que de viande, cuisinant des valeurs sûres et identifiables dix bleds à la ronde pour incarner des inconnus (… qui volait la job de qui, au juste ?). Une humoriste quarantenaire dans les jupons d’une aspirante étoile vivant encore chez ses parents ? Un détail comme ça. Réaliser Stardom et apparaître dans sa version ciné-parc ? Ça occupe. Citer McLuhan tout en prenant soin de ne jamais s’aliéner les lecteurs de l’Almanach du peuple ? Ça doit être ça, du vrai humour démocratique. Que seuls les bornés n’apprécieront pas, sans aucun doute.


© 2007 Charles-Stéphane Roy