mardi 17 juillet 2007

Critique "Rock School"

Rock School
de Don Argott
2005
Paru dans l’hebdo ICI Montréal


LA PROF ATTITUDE

L’adage veut que les vrais artistes tablent sur une enfance malheureuse. C’est précisément à cette période qu’intervient Paul Green, titulaire d’un Rock School et Maître ès fureur. Rien de mieux que de souffrir pour s’instruire.


Philadelphie, ville de l’amour fraternel ? On en est un peu moins sûr après avoir fait la connaissance de Paul Green, homme-orchestre issu d’un improbable jam-session entre Rocky et les Broad Street Bullies. Fan fini de Santana et de King Diamond, ce petit teigneux patibulaire au vocabulaire insalubre a fondé le Paul Green School of Rock Music, qui ne se limite pas aux arpèges et à la lecture à vue – sa définition de tâches embrasse de plus vertueuses leçons : il souhaite surtout transmettre à ses élèves la rage derrière le mur de son, plus précisément la sienne, nourrie de ses rêves déçus d’arénas et d’albums concept.


Green bonifie la passion sur la technique selon une rhétorique mi-caporale, mi-groupie, librement inspirée par Full Metal Jacket et l’émission The Osbourne. Virtuose ou cancre, la méthode Green n’épargne personne : il faut le voir comparer sans cesse les apprenti rockers entre eux, passer des encouragements aux jurons et devenir gaga en moins de deux lorsque sa troupe débarque à la Zappanale, convention allemande vouée au répertoire du défunt moustachu, compositeur iconoclaste d’Inca Roads.


Comme si la chose était possible, Rock School s’avère être plus qu’un School of Rock pour vrai avec son Jack Black le volume à 11. Laborieux et souvent redondant comme un solo de Neil Young, Rock School passe néanmoins le bac grâce à une authenticité inversement spirituelle à Mr. Holland’s Opus, car heureusement pour nous, le caméraman et réalisateur Don Argott s’est aussi attaché à la personnalité des juniors, dont les jumeaux Asa et Tucker Collins, préposés de 9 ans aux covers de Black Sabbath ; C.J., un Steve Vaï de 4 pieds ; Madi, la rappeuse Amish, et surtout Will, potache philosophico-dépressive à la Wesley Willis.


Avec pareille ribambelle devant le lutrin, Green en est quitte pour de grandes démonstrations de psychologie groupale, parvenant à créer un esprit de corps avec des credo comme « Ne le faites pas ni pour moi, ni pour vous ; faites-le pour Satan ». C’est noté.


© 2007 Charles-Stéphane Roy