vendredi 1 juin 2007

Critique "Carandiru"

Carandiru
de Hector Babenco
2004
Paru dans la revue Séquences


On connaît surtout le Brésilien Hector Babenco pour les sombres Pixote (1981) et Kiss of the Spider Woman (1985) sans oublier l’initiatique At Play in the Fields of the Lord (1991), co-écrit avec Jean-Claude Carrière. Après une convalescence de plus de sept ans, il revient avec Carandiru, devenu l’an dernier le plus grand succès commercial que le Brésil ait connu.


Babenco a articulé ce récit ayant fait la une de la presse nationale à São Paulo en 1992 autour du véritable témoignage du docteur Dráuzio Varella, son propre médecin personnel et, incidemment, le responsable médical de la prison en cause chargé de prévenir la propagation du SIDA et soigner les nombreux cas de tuberculose. Personnage mcguffinesque au possible, il offre le crachoir à quelques-uns des sept mille pensionnaires de l’institution qui livrent leurs impressions sur le chaos ordonné régnant entre les cellules ; il faut savoir que cette institution, construite initialement pour n’accueillir que trois mille prisonniers, fut autogérée par les détenus, car jugée trop anarchique par l’État.


Le film navigue donc entre ces scènes de la vie carcérale, s’attardant parfois aux délits antérieurs des criminels et de la microsociété qu’ils ont conçu au fil du temps à l’écart de leurs semblables, puis les allées et venues de Varella, personnage fuyant et unidimensionnel à la limite de l’indolence. Et voilà précisément où le bât blesse : suggérer un capharnaüm humain par un manque d’unité dramatique n’est pas une sinécure en soi, si bien que cette cacophonie épuise inutilement le spectateur.


Ce qui est bien dommage, car au-delà de la considérable somme d’intrigues secondaires et de stéréotypes trash, Carandiru parvient à son terme, soit durant le siège final précédant le massacre de cent onze prisonniers par la police, à former à l’arraché un propos cohérent, ciblé et fédérateur sur l’inhumaine condition
subsistant dans les prisons brésiliennes.


© 2007 Charles-Stéphane Roy