mercredi 7 janvier 2009
Critique "Adam’s Wall"
ADAM'S WALL
de Michael MacKenzie
Paru dans la revue Séquences
2008
Les communautés anglophones et/ou juives québécoises au centre de cette comédie dramatique sont dans l’ombre d’un sujet d’autant plus dominant : Montréal. Peu de films francophones auront autant placé la métropole en avant-plan, quitte à venir voler la vedette à leur sujet.
Tel est le cas d’Adam’s Wall, le 2e long métrage de Michael MacKenzie, pour qui The Baroness and the Pig fut une rampe de lancement éclatante à Sundance comme au Gala des Prix Jutra. Le coscénariste du Polygraphe de Robert Lepage, également dramaturge et metteur en scène sur les planches à New York et Toronto, a imagé le récit de Dana Schoel portant sur les déboires amoureux d’un adolescent-chérubin Juif déchiré entre son idylle pour une Libanaise et l’intrusion de son grand-père, un rabbin orthodoxe peu enclin aux fréquentations arabes du quartier.
Si Montréal l’enneigée se fait belle sous la caméra de MacKenzie, on entend aussi en sourdine les grondements du Liban et la crise du printemps 2007 par les recherches de Yasmina pour retrouver sa mère, portée disparue dans un Beyrouth croulant sous les obus.
La construction même du récit, allers-retours entre les tribulations de ces Roméo et Juliette du Mile-End et leurs accaparantes communautés, lui donnent une tournure au détriment du fondement même du film, l’amour naissant entre deux jeunes adultes peu habitués à l’intimité et à l’émancipation hors des synagogues, avec l’intention d’en faire des modèles culturels plutôt que de simples et tangibles individus pour qui l’amour n’a jamais été au centre de leur vie.
Le casting reste toutefois l’irritant majeur d’Adam’s Wall. Malgré la présence au générique de la talentueuse Flavia Bechara, vue dans Le cerf-volant de Randal Chahal Sabbagh (Lion d'Argent du Festival de Venise en 2003), l’attention se bute irrésistiblement sur les fausses tempes blanchies pour faire de Paul Ahmarani un quadragénaire libanais, ou l’interprétation limite de rabbin intransigeant par le vétéran Gabriel Gascon, pourtant adopté depuis longtemps par les productions anglophones – de Black Eyed Dog à Mrs. Parker and the Vicious Circle, mais dépossédé ici de son timbre caverneux si exquis et familier à la faveur d’un doublage deux octaves plus haut. Reste Montréal, dont on redécouvre les atouts derrière cette faune et cette proposition incongrues.
© 2008 Charles-Stéphane Roy