vendredi 1 juin 2007

Critique "I, Robot"

I, Robot
de Alex Proyas
2004
Paru dans la revue Séquences


La proposition initiale de I, Robot a de quoi étonner : que pouvaient bien avoir en commun Isaac Asimov, Alex Proyas et… Will Smith ? Peu de choses, en somme, mais il ne faut pas oublier que Smith est également producteur exécutif de cette entreprise. Comme affirmait Georges Orwell dans Animal Farm : « Si tous sont égaux, certains le sont plus que d’autres ». Oubliez donc l’humanisme visionnaire du premier et les épanchements existentiels du second: ce film n’est rien de moins qu’un véhicule estival pour l’ex-Fresh Prince, sa vaniteuse musculature et ses one-liners infantilisants. On est donc plus près ici de Robocop que de Blade Runner.


Dans ce Chicago de 2035 où les voitures se conduisent sans les mains et les bonniches carburent aux piles – Minority Report, vous vous rappelez ? – la U.S Robotics tente d’implanter dans tous les foyers son plus récent bipède A.I., sorte de Terminator aux traits adoucis. Malheureusement pour eux – et pour nous, l’agent Spooner veille au grain et casse du robot guidé par un douteux esprit ségrégationniste (il est Noir). Flairant l’invasion imminente, il enquête sur les intentions de la compagnie mère avec une prétention et une attitude qu’il confond avec du jugement et de la répartie. Ce prophète du ghetto en profitera au passage pour casser encore plus du robot à défaut de pouvoir tomber la scientifique (blanche) et faire la morale aux corporatistes dont la conception du progrès pencherait tendancieusement vers l’eugénisme industriel. On en a presque peur.


Sinon, au lieu d’élaborer une lecture inédite sur nos rapports technologiques ou la nature de l’esprit humain, le scénario de Vintar et Goldsman emprunte bêtement la voie du jeu vidéo et des cascades, entre deux placements publicitaires pour Audi et Converse. Dans ce contexte, n’importe qui – Asimov le premier – aurait penché en faveur des cyborgs ! Mais qu’importe : à l’heure du clonage, avouons que les histoires de robots, c’est franchement dépassé…


© 2007 Charles-Stéphane Roy